La relation client comme révélateur
La valorisation des fonctions Compléter les équipes en contact clientèle Rechercher les compétences transversales Les badges métiers et les émulations De la charte client à l’utopie d’entreprise |
Observons la file d’attente devant les enregistreurs d’une compagnie aérienne les guichets d’un transport urbain ou d’un chemin fer,. Cela fonctionne t’il bien ou mal ? En quelques instants il est possible de déceler si la relation client est à la hauteur de la tâche. L’agent en uniforme (impeccable ?) s’approche t’il de la mère de famille encombrée, du quinquagénaire bien mis qui n’a pas ses lunettes par coquetterie, pour les aider à manipuler la machine ?. Le client qui s’approche de l’agent pour s’enregistrer et laisser ses bagages après avoir fait la queue est il accueilli et renseigné avec attention par l’agent en uniforme ? Le contrôleur galonné comme un cavalier démonté est descendu du train pas très à l’aise, dans le grand espace de la gare TGV, prend il en compte avec la compassion nécessaire le centième voyageur qui, sous l’afficheur, lui demande si le quai A est bien là où il est écrit «quai A »?. Ou bien, au contraire, les agents en uniforme se sont ils regroupés dans un coin pour discuter congés le dos tourné aux voyageurs hésitants qui errent dans un roulement de valises ? .Cette relation au client est une expérience de tous les jours. Elle est complexe parce qu’elle nécessite une quasi permanence de l’attention à l’autre. Et parce que l’impolitesse, la brutalité et l’incohérence, quand ce n’est pas la mauvaise foi des clients sont fréquentes. Les formations ont appris aux agents à placer le contact dans le registre du respect en imposant d’entrée une formule de politesse. Mais combien de ces bonjours deviennent excédés, et peu amènes.
Montons à bord. Un gros porteur, les équipes des personnels navigants ont placé, vérifié, donné les consignes. On s’installe, le temps passe. Ils sont nombreux et il est facile de se faire une idée de cette part de l’implication personnelle qui fait la relation client. On distingue rapidement les équipes homogènes (ils ne se connaissaient en général pas il y a une heure), à l’entraide quand il s’agit de porter secours au 14 B ou au 48 F qui s’impatientent. On remarque aussi vite (en classe économique) la chemisette du steward qui choisit la liberté, son air maussade et sa propension à se réfugier dans les coulisses, le minimum règlementaire une fois évacué. A l’avant de l’appareil dans les classes affaires, les hôtesses et stewards sont plus classe et plus attentifs aux désirs des passagers. En suivant le détail du service on remarque cependant vite les relations d’empathie personnels-voyageurs. Le choix de menus, des boissons, les petites attentions du service servent de révélateur. Les meilleurs se distinguent vite. Même fatigués, à la fin du vol, ils sont prévenants, ébauchent des relations de plaisanterie avec les plus bavards. Les stewards sont encore tout sourires avec les belles people. Tandis que d’autres font le minimum, visage fermé, avant de se tirer les rideaux du galley d’un geste sec ou de s’isoler ostensiblement dans la paperasse. C’est l’incident qui révèle les attitudes que l’on avait déjà classées. Un passager à un peu trop bu, parle fort, exige. Les comportements réflexes appris en jeux de rôles sont mis en pratique. Conciliabules, action commando. Remarquons que le déclenchement de l’action est d’autant plus long que le passager est important. Et que ce sont les mêmes, les meilleurs dans la chaleur serviable, sont à la pointe de l’action. Dans les gros porteurs les chefs de cabine donnent le style à leurs équipes et c’est un plaisir pour l’observateur de les voir prendre en main leurs subordonnés dès l’arrivée des passagers. Et vraisemblablement se faire ainsi une idée sur la part d’âme qu’ils mettent dans leur travail. Plus à l’avant, le commandant a l’autorité de sa fonction et pratique la relation client à sa façon. La compétence donnant l’aisance c’est informatif, clair, propre à assurer et rassurer. Les annonces lors des incidents du vol rendent la densité de l’attention quasi palpable, une fois passés on se détend, on plaisante quelquefois dans la pointe avant, pas toujours dans la finesse. Et puis le commandant se promène « en salle » comme le chef d’un trois étoiles, quelquefois en plein uniforme, mais souvent en chemisette, un bonjour aux VIP signalés.
En chemin de fer, suivant les trains, l’on à affaire des équipes ou à des conducteurs, contrôleurs plus ou moins seuls. On va partir, le contrôleur agent de train a fait son annonce suivant les règles, « le chef de bord » ou, « l’équipe commerciale », c’est selon. Il fait un aller retour sécurité rapide, le train dans sa longueur, vérifie les portes et s’esquive. Au Japon, il se retourne avant de quitter la voiture, s’incline et salue les voyageurs. Les contrôles commencent. La relation client est enrichie par le côté technique du travail. L’ordinateur et la sacoche, le téléphone portable dédié marquent la distance. Convenons en, connaissance et pratique de la multitude des situations du quotidien donnent à ces agents une autorité. Dans ce contexte, de nouveau, les connaissances, la compétence et l’expérience d’une responsabilité donnent un sens à la relation client. Il est plus facile d’être attentif, prévenant, quand on est mandaté d’un pouvoir et que l’on a été formé à un niveau de responsabilité.
Cette fonction de contact et de contrôle, d’information et de sanction n’est pas toujours bien vécue par la corporation. Il n’y a pas comme dans les avions un commandant de bord qui possédant l’ensemble des informations, a la capacité de rassurer. Ici, pour un arrêt du train, un retard, le contrôleur dépend de ce que veulent bien lui dire ses chefs au sol. En fin de compte le contenu des messages est bien pauvre et il est arrivé que des voyageurs en manque d’information se mettent à la recherche des contrôleurs barricadés dans leur réduit. Regardons le traitement des sans billet. Agitation, mauvaise foi et injures glissent en apparence, mais la tension intérieure est forte. Un cran au dessus, on appelle les collègues. Si le cas s’aggrave quand le contrôle tourne au pugilat devant les voyageurs qui font mine de ne rien voir, les jeunes contrôleurs, trop peu nombreux, mal assurés, battre en retraite. Le renfort de quelques collègues calme le jeu, mais assez souvent cela se termine par une course poursuite sur les quais de la prochaine gare, le retard du train et la fureur des habitués. Drôle de relation client à ce niveau là, drôle de banlieue, il est beaucoup demandé aux jeunes agents, affectés d’office. La hiérarchie s’en soucie t’elle ?
En bus ou dans un autocar, il est presque possible, au premier coup d’œil, de voir dans quelle catégorie de la relation client se situe l’agent.. Il est isolé certes, protégé par un vitrage aux heures critiques mais il a, à la différence du conducteur de tram ou de métro dans sa cabine, la capacité de développer un contact avec les voyageurs. Les débuts de services aux petites heures sont un moment de convivialité, de chaleur humaine. Le conducteur est reposé, on circule bien, la radio d’ambiance qui donne les nouvelles est assez forte pour que les voyageurs en profitent, les habitués ont droit à un salut. Le service du transport est un service rendu, apprécié, valorisant pour l’employé. Cet état d’esprit subsiste dans les autocars interurbains quand les scolaires sont au collège. Plus tard dans la journée fatigue et stress aidant le conducteur est souvent indifférent, dans la situation de l’employé et il en fait le minimum. Pas de contrôle, juste la circulation, la sécurité des portes, chaque poussette est un retard, les voyageurs s’énervent. Dans ces conditions organiser une relation client de qualité semble une gageure. Classons : dans les villes petites et moyennes les conducteurs peu nombreux, affectés à une ligne, ont un statut social. Ce sont à tout le moins des connaissances que l’on salue. Dans les grands réseaux c’est les roulements, remplacements et changements d’affectations excluent souvent cette relation ; on produit des kilomètres dans un contexte stressant, et rares sont les personnels qui gardent un sourire aux périodes de pointes. Rendre le service accueillant aux clients est une tâche difficile. Les conducteurs sont isolés et les équipes volantes n’interviennent qu’en cas de coup dur.