La première impression est toujours la bonne, surtout quand elle est mauvaise.
C’est au départ de Los Angeles, le vol AF 065, un A 380 d’Air France. Pont supérieur en classe affaires, embarquement sans histoire après scanner et « pat down » des TSA boys. Le Patriot Act et ses conséquences sur notre dignité, on s’y habitue. Bien installé, chacun prend ses aises, ajuste les nombreux réglages électriques, dépose ses petits objets dans les recoins qu’offrent les imposants sièges extensibles.
Cela fait maintenant un quart d’heure que l’heure de départ est passée. L’appareil n’a pas bougé, pas d’informations, pas de vidéo, pas de rafraîchissements. En business à l’aller, en 777, a peine assis, c’était le champagne.
Le temps passe
1°/ Un voyageur, une tête connue de la musique, s’étonne de n’avoir pas trouvé de journaux ; ni dans la passerelle, ni en cabine. La chef explique : « nous ne mettons pas de journaux pour éviter que des voyageurs qui empruntent la passerelle avant du pont supérieur ne les emportent ! » Diable. Le voyageur s’énerve et réclame l’Équipe. La chef va en chercher un exemplaire. Le temps passe.
2°/ Une demie heure après l’heure de départ. L’avion n’a toujours pas bougé, pas de rafraîchissements pas de vidéo, ni de journaux, la classe business s’impatiente, des passagers en correspondance, essoufflés d’avoir couru se précipitent vers le fonds de la cabine et l’escalier intérieur, vers la classe voyageur.
3°/ Le ridicule : après l’annonce en français des causes du retard subi (correspondances en retard) et du retard à subir (report d’un « slot » de décollage) le commandant se lance dans la version anglaise. On est charitable, on ne critiquera ni l’anglais ni l’accent, mais on est surpris par le début de l’annonce ;
« Your Commander speaking » Diable, le commandant de bord « Captain » est devenu Commander, The Commander, il est maintenant le Claire Blake de la série Police Criminelle de Londres, un super policier…
Peut être était-ce « Your Commodore speaking » Dans ce cas, c’est évident, notre commandant ne peut être que « Air Commodore », un air d’officier supérieur, un grade porté par Churchill en grand uniforme à la conférence de Téhéran, un titre hon oraire pour le prince Charles…
Le souffle mermozien de cette annonce a fait lever quelques sourcils parmi les voyageurs qui écoutent et que rien n’occupe sauf attendre. Mais toujours pas de rafraîchissements ni de journaux.
4°/ Une heure s’est écoulée en attentes diverses, nous venons de quitter la piste, le personnel de cabine apparaît et s’active. Les 54 passagers de la cabine « haute contribution » de la classe affaires situés en aval de la passerelle ont attendu une heure sans le réconfort d’un verre, d’un journal, d’une parole du personnel. Je ne sais comment ont été traités les 26 autres « business » de la pointe avant du pont supérieur. Peut être ont-ils été chouchoutés comme dans n’importe quelle compagnie orientale, allemande, anglaise…
Quelles conclusions pour la Relation Client Transport ?
En premier lieu la relation client est avant tout l’affaire des personnels.
Dans cet épisode de départ retardé, l’on pouvait très nettement discerner dans le comportement du personnel commercial la volonté de limiter au strict minimum ses relations avec les voyageurs. Préférer se cacher quand l’irritation d’une attente non justifiée agite les passagers, donner, quand la question est clairement posée, des explications aussi peu crédibles que le passage des autres voyageurs pour ne pas distribuer de journaux, que prétendre attendre le décollage pour ne pas faire la tournée des rafraîchissements. Par-dessus tout, faire des passagers inoccupés les auditeurs forcés de l’annonce prétentieuse et ridicule d’un commander, d’un commodore, mais certainement pas d’un capitaine.
Pour terminer ce triste état des lieux, précisons tout de même que, l’A 380 ne « passe » pas par le terminal habituel d’Air France à Los Angeles. Il est donc possible que la passerelle supérieure avant soit la seule accessible dans les fins d’embarquement et que le passage des retardataires justifie le décalage du service…pourquoi alors ne pas l’annoncer avec simplicité, un sourire ?